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Alexandre Coderre - lauréat du concours Mnémosyne - Prix du meilleur mémoire 2016

Author : Guignard Sophie
Date : Jun 20, 2016
Category :
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Concours et bourses

Créé en 2008, le concours Mnémosyne vient chaque année consacrer le meilleur mémoire de maîtrise soumis par un étudiant membre de Figura. Cette année, Figura, le centre de recherche sur le texte et l’imaginaire, a décerné le prix du meilleur mémoire à Alexandre Coderre pour son mémoire intitulé «Livre total, communauté de lecteurs et dérive interprétative dans Fragments de Lichtenberg de Pierre Senges ». Son mémoire a été présenté au département d'Études littéraires de l'Université du Québec à Montréal et dirigé par Jean-François Chassay.

Félicitations !

 

Résumé du mémoire:

« Plusieurs  fictions  françaises  contemporaines  détournent  l’érudition  de  son  mode  de connaissance des faits et d’authentification des textes afin d’établir un rapport critique ou ludique  aux  savoirs.  Elles  formulent  bien  souvent  une  réflexion  sur  les  conditions  de possibilité de l’interprétation littéraire, surtout lorsqu’elles mettent en scène des enquêtes philologiques ambitieuses et des tentatives de déchiffrement de documents anciens. L’œuvre de Pierre Senges s’inscrit définitivement dans cette tendance. En faisant tourner son intrigue autour d’une communauté de lecteurs qui cherchent à reconstituer pendant tout le XXe siècle l’hypothétique roman-fleuve de Georg Christoph Lichtenberg (1742-1799) à partir des huit mille aphorismes de ce savant des Lumières allemandes, Fragments de Lichtenberg (2008) oppose  entre  elles  deux  théories  de  l’interprétation : l’herméneutique intentionnaliste  et l’herméneutique anti-intentionnaliste. La première postule que l’intention des auteurs et le statut historique des genres littéraires déterminent la signification des textes, conférant ainsi à l’interprétation la tâche d’une reconstruction du sens ; la deuxième, se référant aux thèses de l’indétermination  de  la  signification  et  de  l’inaccessibilité  de  l’intention,  considère  au contraire les lecteurs comme les seul producteurs du sens de ce qu’ils lisent.

Le  présent  mémoire  départage  ce  qui  relève  de  l’une  et  de  l’autre  de  ces  deux herméneutiques pour montrer, en dernière instance, que Pierre Senges se sert des hypothèses interprétatives erronées de ses personnages de lecteurs afin de relancer l’opération fictive de son propre roman. L’épistémocritique, qui analyse les figures et les procédés rhétoriques par lesquels s’inscrivent les savoirs dans les fictions littéraires, et la théorie des configurations narratives de Paul Ricœur, selon laquelle les pactes de lecture assurent une lisibilité même au récits les plus déconstruits, sont les deux approches choisies pour mettre en évidence cette conversion de l’hypothétique en imaginaire.

Plus précisément, ce sont les figures du livre et de la communauté qui configurent dans un   ensemble   signifiant  les   dérives   interprétatives  dont   est   constitué   Fragments   de Lichtenberg. L’hypothèse d’un livre total attribué à tort à Georg Christoph Lichtenberg est un prétexte pour décliner presque à l’infini les spéculations au sujet du genre de l’œuvre en question et  de la  vie  de son  auteur.  La  communauté  des lecteurs, quant à  elle, permet d’historiciser  les  hypothèses  interprétatives,  de  relativiser  les  méthodologies  des  études littéraires et de produire un récit original du XXe siècle. Ces deux figures sont le support d’une paranoïa du déchiffrement, dont Pierre Senges fait à la fois l’éloge et la critique. »