Justin Trudeau, quand le miroir s'avale
Au rythme du chant politico-pop du vrai changement, les citoyen.ne.s crient aux images qu’elles ne les tromperont plus; qu’illes ne sont pas dupes et que les masques tomberont. Alors, sur l’écran, leurs reflets se superposent au visage de Justin qui semble enfin les comprendre. Illes pensent : « T'a[s] l'air de ma famille, en plus belle, en mieux habillé(sic). Ta femme [et toi êtes] mieux peigné[s] que moi, mais en gros, tu nous ressembl[es] (1)». Le visage répond, en murmurant : je suis à l’écoute et authentique (2).
Ce naturel, ce je-suis-vrai (entendre par là : un premier ministre à votre image), qui se construit dans un registre intime/privé est directement symptomatique d’un glissement, « d’une mutation qui, partant des formes traditionnelles de répression et de contrôle caractéristiques du début du capitalisme […], va vers de nouvelles formes de gestion de la subjectivité et de contrôle du corps, des formes horizontales, flexibles et chaudes qui remplacent la camisole de force par deux oreilles de lapin et une petite queue en peluche (3)». Ainsi, la figure Justin Trudeau – premier ministre playboy – passe de corps en corps à travers les images. Elle est cette frontière où le Spectacle et le panoptique s’interpénètrent.
Quand il serre des mains à la station Jarry au lendemain de sa victoire, quand il se fait tomber dans les escaliers pour faire rire, quand il établit la parité hommes-femmes because it’s twenty-fifteen, quand il bat les méchants conservateurs comme Patrick Brazeau dans un ring, quand il chevauche des licornes sur des sweaters rainbow, quand il mange sa face en biscuit, quand il drape son corps nu huilé de l’unifolié, quand il embrasse Barack dans une fan-fiction érotique, quand il tremble avec toi pour le Canada; il se glisse sous ta peau tel un Mickey Mouse que tu aimes mais qui ne te respecte pas.
Cet appel à contribution n’est pas une invitation à parler de Justin Trudeau, mais à réfléchir le contexte qui lui confère pouvoir et aura. Nous vous invitons donc à aborder des problématiques telles que le Spectacle et ses déclinaisons, le politique carnavalesque, le néopopulisme, les rapports au pouvoir dans le contexte actuel, ainsi que nos interactions avec les diverses formes d’écrans, spectres et miroirs qui hantent notre quotidien.
Veuillez soumettre vos textes créatifs, essais et images (en noir et blanc); d’une longueur maximale de 1500 mots pour les créations littéraires et de 2000 mots pour les essais à l’adresse:
1) http://quebec.huffingtonpost.ca/bianca-longpre/cher-justin-trudeau_b_8359172.html
2) http://www.tvanouvelles.ca/2015/08/10/justin-trudeau-se-dit-a-lecoute-et-authentique
3) Paul B. Preciado sous Beatriz Preciado, Pornotopie: Playboy et l'invention de la sexualité multimédia, Paris, Climats, p. 177.