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Mise en trope: les nouvelles plasticités de la rhétorique

Author : Guignard Sophie
Date : Apr 17, 2018
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Activité étudiante
Colloque

COLLOQUE ANNUEL DE l'AECSEL 2018

Pour cet évènement annuel, l'AECSEL propose un colloque multidisciplinaire sur les nouvelles plasticités de la rhétorique et sur les enjeux culturels, idéologiques, pédagogiques ou toutes autres problématiques pertinentes en lien avec celles-ci.
 
Le mot trope vient du grec tropos qui signifie à la fois tourner autour (comme l'héliotrope se tourne vers le soleil) et détourner (comme le psychotrope détourne la psyché de ses fonctions ordinaires). Dans la rhétorique ancienne, ce mot, généralement employé comme synonyme de figure de style, définit plus précisément une figure (dont la métaphore serait la forme par excellence) qui aurait pour effet de détourner les mots de leur sens dénoté pour les faire entrer dans le domaine de la connotation. Conçue comme une sorte d'écart et de détournement proprement ornemental, cette définition du trope, par le biais de grammairiens comme César Dumarsais ou Pierre Fontanier, s'est plus ou moins maintenue intacte jusqu'à ce que la sémiologie s'empare de la question au XXe siècle.
 
À partir des essais sémiologiques de Louis Hjelmslev, lui-même successeur direct de Ferdinand de Saussure, la réflexion sur les expressions linguistiques s'est décloisonnée des simples considérations proprement sémantiques pour se concentrer, en plus, sur l'aspect matériel des énoncés : ce que le philosophe nomme la forme du contenu par rapport à son sens. Pour le danois, le processus de sémiose serait à analyser dans l'interaction entre ces deux aspects. À partir de cette idée nouvelle, toute une sémiologie des objets a pu voir le jour et c'est sans surprise que celle-ci s'est directement réclamée de la rhétorique : qu'on pense aux rhétoriques de l'image de Roland Barthes ou du Groupe µ qui doivent beaucoup à Hjelmslev. Par là, le trope se retrouve à être non pas occulté par cette fusion de la rhétorique et de la sémiologie, mais se retrouve au contraire entièrement renouvelé par cet état de fait. La nature ornementale du trope, qui épouse très bien les considérations plastiques de la langue et des images, jumelée à sa nature analogique et connotative, peut désormais participer pleinement du processus sémiotique des objets, des gestes, des images, des codes et des symboles.
 
C'est ainsi que le trope, de nos jours, tend à prendre le sens de « lieu commun » et que le tropos devient topoï. C'est aussi pourquoi un site comme TVtropes.org peut définir ainsi cette figure : « tropes are more about conveying a concept to the audience without needing to spell out all the details ». Roland Barthes, dès ses analyses sur la publicité, en disait déjà autant de l'image. Par rapport à l'affiche de Panzani, le sémiologue français faisait de l'italianité cette chose que le message comporte en plus. Il en vient donc à penser la connotation de l'image sur le mode de la rhétorique. Par l'usage de l'agencement de stéréotypes comme les pâtes, les tomates et le mot aux consonances italiennes, l'image en vient à faire signifier à ses objets une culture complètement absente de l'image ou du contenu de l'expression si on les prend au sens propre. Dès lors, la rhétorique du trope peut se penser comme la dialectique d'une absence signifiante et d'une présence vide, et ce, sans qu'elle ne perde sa fonction de détournement, l'outil par excellence du processus. C'est aussi en ce sens que l'on peut comprendre le tropisme de Nathalie Sarraute, pour qui il s'agit de toutes ces petites situations qui ont lieu pendant l'enfance et qui créent un sentiment de déjà vu ou influencent nos préférences personnelles et nos comportements une fois devenus adultes.
 
Par la sérialité qui existe dans les arts, depuis la massification de la littérature industrielle au XIXe siècle, les tropes se véhiculent de plus en plus facilement en raison de la rapidité avec laquelle les signes sont codés pour devenir des conventions linguistiques et sémiotiques. C'est ce qui permet à la fois leur démultiplication, mais aussi leur déconstruction, puisque l'accroissement du nombre en a fait un objet d'étude de choix. La multitude des médias et des plateformes disponibles permettent parallèlement un renouvellement constant de ces figures parfois très anciennes, même si celles-si se retrouvent souvent recyclées par l'entremise de ce processus. Ainsi, elles semblent plus foisonnantes et plus originales que jamais.
 
Que ce soit dans la littérature, à la télé, au cinéma, dans le jeu vidéo, dans la publicité ou ailleurs, il s’agira de s’interroger sur les nouveaux habits du trope : stéréotypes, lieux communs, gestuelles familières, détournements de figures connues, recyclage des codes de genres, intertextualités, etc.; mais aussi sur les pratiques qui déconstruisent ceux-ci par le biais de l'humour, de la subversion politique, de l’intermédialité ou autres. Il sera alors possible mettre en valeur les littératures, la culture populaire, les pratiques culturelles médiatiques ainsi que les perspectives minorisées, marginales ou discréditées par les institutions artistiques, dont les paralittératures, en mettant de l’avant ce travail de mise en forme.
 
Conférence d'ouverture de Jean-Michel Berthiaume.
 
Le colloque sera diffusé en simultané sur le site de l'OIC.

Participation / Organisation

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