Journée d'étude
Journée d'étude en recherche-création
À partir des préoccupations de recherche-création, les étudiantes et étudiants du séminaire Approche du travail créateur proposent d'interroger, lors de cette journée, les matières à inquiétude en littérature. Sous la forme d'essais-fictions, leurs présentations chercheront à investir un espace instable de la parole où deux dimensions du discours se rencontrent, avec des visées distinctes, mais au service de l'inquiétude.
L'événement est ouvert à toutes et à tous.
Consultez le programme en pièce jointe.
La journée d'étude sera suivie du lancement de Quartier F, un espace web dédié à la création et à la fiction.
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En interrogeant les modalités d'apparition de l'inquiétude dans le processus de création ainsi que le conflit productif qui accapare le lecteur devant des objets littéraires inquiétants, le séminaire Approches du travail créateur - Matières à inquiétude veut générer et éclairer des pratiques narratives qui n'ont ni comme projet de rassurer, ni comme souci principal, paradoxalement, de raconter. Ces pratiques recherchent plutôt à orchestrer un inconfort qu'elles s'assurent de transmettre par les œuvres qui en sont issues, elles-mêmes déroutantes, non fiables, dysfonctionnelles sur le plan du récit.
Ces pratiques occupent et créent un espace instable de la parole qui, tel que l'exprime Foucault, " manque de repos ", comme si elles contenaient cet " état d'agitation d'un esprit insatisfait " et se présentaient comme l'ombre des " pouvoirs et dangers qu'on imagine mal " (Foucault, 1971 : 10), avec lesquels, pourtant, créateurs et lecteurs n'ont d'autre choix que de négocier. La porosité des frontières de la fiction, les approches mystificatrices qu'elle encourage, malmenant les possibilités de véridiction, constituent tout autant de modes de représentation ambigus que la création investit pour leur insaisissabilité : " quelque chose fait irruption qui déborde le système du pensable et ouvre une possibilité de "penser autrement" " (Certeau, 1987 : 53). Un tel débordement, une telle irruption - que la notion d'inquiétude vient désigner ici - pousse naturellement au surgissement de la fiction (mécanisme compensatoire à l'incertitude), mais peut aussi devenir réel lieu à investir par la fabrication, l'imposture, voire la mauvaise foi : " la littérature […] peut relever de conduites qualifiées dans le langage courant de mauvaise foi : c'est-à-dire mentir, duper le lecteur, le surprendre, exercer sur lui son emprise, sa force de séduction. Mais aussi d'une mauvaise foi sartrienne entendue comme capacité à forger des concepts contradictoires, et donc comme mode très spécifique de pensée qui modifie son rapport au réel, à la vérité et au lecteur. " (Decout, 2015 : 19)
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Certeau, Michel de, Histoire et psychanalyse entre science et fiction, présentation de Luce Giard, Paris, Gallimard " Folio essais ", 1987.
Decout, Maxime, En toute mauvaise foi. Sur un paradoxe littéraire, Paris, Minuit, 2015.
Foucault, Michel, L'Ordre du discours, Paris, Gallimard, 1971.