Que faut-il entendre par « politique de la littérature »? Nourrie des apports de l’histoire culturelle et de la sociologie de la littérature, cette notion a d’abord une valeur heuristique : elle devrait nous permettre d’échapper aux malentendus et aux paradoxes générés par la reprise décontextualisée et déshistoricisée du lexique de la littérature engagée. Depuis le milieu du XXe siècle, on ne compte plus les auteurs et les autrices qui refusent la conception sartrienne de l’engagement tout en réitérant leur croyance dans le pouvoir des mots à agir sur la vision dominante du monde social. Comment circonscrire les nouages de la littérature et de la politique sans reconduire la doctrine emblématique des Temps modernes?
À titre provisoire, on définira une politique de la littérature comme un système de pratiques et de représentations par lequel des acteurs et des actrices du champ littéraire (créateurs, critiques ou théoriciens) négocient la relation symbolique de la littérature au monde social et à ses registres de conflictualité. Autrement dit, une politique de la littérature aura pour fonction de décrire et de prescrire des manières de dire et de penser, mais surtout des façons d’écrire et de lire, en les présentant comme autant d’interventions critiques dans l’espace public et comme autant de réponses à la violence symbolique qui structure les rapports de domination. Objets de lutte, les concepts de littérature et de politique s’y trouvent de fait moins présupposés que discutés, parfois contestés, au regard des états successifs du champ littéraire et du champ politique.
À l’occasion d’une journée d’études, nous souhaitons réunir des chercheurs et chercheuses qui s’intéressent à la notion de politique de la littérature et leur proposer d’en tracer les contours, d’en mesurer la portée analytique, d’en évaluer la pertinence à la lumière de différents objets et problématiques. Plus précisément, les participants et les participantes seront invités à présenter une recherche en cours qui illustre les usages possibles de cette notion à partir d’une étude de cas (un texte, une pratique, une œuvre, une polémique, un collectif, etc.). Seront accueillies les approches matérialistes, féministes et queer, décoloniales, afin d’aborder les impensés des politiques de la littérature. Ainsi, à travers des corpus des XXe et XXIe siècles, il s’agira de poser les jalons d’une réflexion collective sur la capacité des études littéraires contemporaines à rendre lisible la diversité sociale et historique des rapports de la littérature et de la politique.
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