Études végétales / Plant Studies, Hiver 2020
Sous la direction de Rachel Bouvet et de Stephanie Posthumus
“Par les plantes, la vie se définit d’abord comme circulation des vivants et, à cause de cela, se constitue dans la dissémination des formes, dans la différence des espèces, des royaumes, des modes de vie.” (Emanuele Coccia, La vie des plantes 22)
Ce numéro spécial de L’Esprit créateur vise à rassembler des recherches en études végétales ainsi qu’en littérature française et francophone contemporaine. Autrefois reléguées au rôle de décor, les plantes attirent l’attention des philosophes et écrivains intéressés par des découvertes scientifiques récentes sur l’intelligence et la communication du végétal (Gagliano; Mancuso et Viola). Alors que le biologiste Francis Hallé promeut une approche centrée sur la plante dans L’Éloge de la plante (1999), le philosophe Emanuele Coccia développe une “métaphysique du mélange” à partir de la prémisse que les plantes sont les principales fabricantes du monde habitable. Un architecte-paysagiste reconnu, Gilles Clément, plaide dans Éloge des vagabondes (2002) pour l’importance des herbes comme modèles du mouvement, de l’adaptation et de la résistance. Quant aux littéraires, ils se penchent sur le rôle de la femme dans la botanique du XVIIIe siècle (Meeker and Szabari), la description des jardins dans la littérature française (Bloch-Dano) et les “traces du végétal” dans les œuvres de certains auteurs français et francophones (Bouvet; Termite; Trivisani-Moreau, Taïbi, Pavie).
Nous sommes intéressées par toute contribution qui fait avancer ce domaine de recherche en explorant plus particulièrement les modes par lesquels les plantes sont imaginées et conceptualisées dans la littérature d’expression française contemporaine. Plus précisément, notre objectif est d’aller au-delà d’une lecture métaphorique afin d’examiner comment les plantes se comportent en tant qu’agents dans les textes littéraires. Comment affectent-elles les personnages, l’histoire et le cadre mais aussi la forme du texte lui-même? Quels sont les nouveaux genres littéraires qui explorent le rôle de la vie des plantes, tels que le thriller botanique (Nottret), l’encyclopédie poétique (Le Dantec) et l’herbier littéraire (Sartillot)? À quel point, dans les textes littéraires, les plantes exigent-elles de nouvelles formes de lecture? Comment ces lectures remplacent-elles ou déplacent-elles les préoccupations esthétiques habituelles du style littéraire? Dans quel sens circulent les plantes à travers et avec les textes littéraires grâce aux pratiques d’échange et de collection? Enfin, quel est le rôle joué par les sciences - en particulier la botanique et l’écologie - dans la naissance d’un nouvel imaginaire végétal? Quelle est la place des textes écrits par des botanistes comme Francis Hallé, ou des paysagistes comme Gilles Clément, dans les études littéraires? En répondant à de telles questions, les articles rassemblés dans ce numéro spécial exploreront les approches croisées de la géopoétique, de l’écopoétique et de l’écocritique, qui visent toutes à réaffirmer le rôle des études littéraires en humanités environnementales.
Veuillez faire parvenir les propositions d’articles en français ou en anglais (300-400 mots) accompagnées d’une brève biographie à Rachel Bouvet (bouvet.rachel@uqam.ca) et à Stephanie Posthumus (stephanie.posthumus@mcgill.ca) avant le 1er septembre 2019. La date limite pour les articles (6,000 mots max.) est le 1er mars 2020. Pour plus de renseignements sur les deux directrices de ce numéro spécial, veuillez visiter le site de leur projet de recherche (http://imaginairebotanique.ca/).
Bibliographie
BLOCH-DANO, Évelyne (2015). Jardins de papier. De Rousseau à Modiano. Paris, Stock.
BOUVET, Rachel (2010). “Le botaniste et la guérisseuse : figures de l’imaginaire végétal dans La quarantaine de Le Clézio,” RS/SI, vol 30, no 1-2-3, 179-188.
CLÉMENT, Gilles (2002). Éloge des vagabondes. Paris, NiL Éditions.
COCCIA, Emanuele (2016). La vie des plantes. Une métaphysique du mélange, Paris, Éditions Rivages.
GAGLIANO, Monica (2017). “The mind of plants: thinking the unthinkable. Communicative and Integrative Biology.”
HALLÉ, Francis (2014 [1999]). Éloge de la plante. Pour une nouvelle biologie. Paris, Seuil.
LE DANTEC, Denise (2010, [2004]). Encyclopédie poétique et raisonnée des herbes. Rennes, Éditions Apogée.
MANCUSO, Stefano and Alessandro VIOLA (2015). Brilliant Green: The Surprising History and Science of Plant Intelligence. Translated by Joan Benham. Washington, DC, Island Press.
MEEKER, Natania and Antónia SZARABI (2017). “Chapter 11: Botany” in Gender: Matter. Macmillan Interdisciplinary Handbooks. Ed. Stacy Alaimo. New York, Gale Cengage Learning. 153-69.
NOTTRET, Patrick (2007). Mort sur la forêt, Paris, Robert Laffont.
SARTILLOT, Claudette (1993). Herbarium, Verbarium : The Discourse of Flowers, Lincoln, University of Nebraska Press.
TERMITE, Marinella (2014). Le sentiment végétal. Feuillages d'extrême contemporain. Macerata, Quodlibet.
TRIVISANI-MOREAU, Isabelle, Aude-Nuscia TAIBI, and Cristiana OGHINA-PAVIE, eds. (2015). : Traces du végétal. Rennes, Presses Universitaires de Rennes.
Crédit photo: Araucaria araucana ©Elaine Després