Hiver 2017
Département des littératures de langue française - Université de Montréal
Fondée par Claude Duchet, relayée par des chercheurs comme Edmond Cros ou Pierre V. Zima, ainsi que par une «École de Montréal» (cf. Revue des sciences humaines, n° 299, 3/2010, p. 13-29) dont le Centre de recherche interuniversitaire en sociocritique (CRIST - http://www.sociocritique-crist.org) est l’héritier direct, la sociocritique des textes rassemble des chercheurs tels Marc Angenot, Régine Robin, Isabelle Tournier, Jean-François Chassay, Patrick Maurus, Francis Gingras, Geneviève Lafrance, Sylvain David, Geneviève Boucher, Geneviève Sicotte, Joël Castonguay-Bélanger pour n’en citer que quelques-uns. La sociocritique n’est ni «une» théorie ni «une» méthode, mais une perspective critique et une pratique de lecture des textes : elle rassemble les travaux qui entreprennent de déterminer et de qualifier le rapport entre le littéraire et le social à partir d’une herméneutique centrée sur le texte littéraire et en considérant que le littéraire et le social ne sont pas dans une relation d’extranéité, mais bien dans un continuum discursif et sémiotique.
Le séminaire portera sur la représentation de la ville dans la littérature contemporaine (au sens large de l’adjectif). On s’intéressera aux genres narratifs (roman, récits, nouvelles) et, si le corpus (voir la liste ci-dessous) fréquentera trois villes particulières qui sont Marseille, Montréal et Paris, il flirtera tout autant avec Berlin, Rome, New York, Londres, Barcelone, Ryad, Tripoli, Florence [et al.], de manière à multiplier les angles de comparaison et à mettre en évidence la variété des écritures urbaines actuelles.
Les mutations sociales et technologiques des trente dernières années sont telles que l’idée même de ville est aujourd’hui mise en cause et que les représentations des villes ne cessent de se modifier. La ville contemporaine n’a plus de centre, plus de frontière, plus de marché autarcique. Chaque jour elle crée de paradoxales ruines nouvelles. Les relations interindividuelles et les rapports entre les groupes s’y présentent sous des formes inédites. La pluralité culturelle vient bousculer la tradition des lieux et les vieux récits de fondation. La séparation du privé et du public change autant que l’architecture et que l’organisation des espaces et du temps.
Comment ces bouleversements passent-ils dans la fiction romanesque ? sous quels aspects ? quels sens la littérature leur donne-t-elle ? à partir de quelle sélection d’événements, de lieux, de trajets et de moments ? sur la base de l’élaboration de quels personnages et de la thématisation de quels phénomènes sociaux ? au tamis de quels styles, de quelles écritures, de quelles formes de «mise en texte» ?
Des réponses apportées à ces questions se dégageront des profils littéraires actuels de Marseille, de Paris, de Montréal, de Berlin, de Londres [etc.], villes de mots que l’on comparera pour évaluer leurs similitudes et leurs dissemblances. On prendra la mesure du lest de lieux communs, de redondances et de récurrences hérité des modèles légués par la tradition littéraire pour mettre ensuite en évidence la diversité des œuvres contemporaines en les rapportant à l’évolution des sociétés urbaines de 1945 à nos jours.
Les travaux porteront sur un corpus d’une vingtaine de romans, de récits et de recueils de nouvelles. Le séminaire se déroulera comme suit. Après trois séances d’introduction (théorie, histoire, méthode), quelques séances seront consacrées à un fonds commun de lectures critiques (examen attentif d’études portant sur le sujet du séminaire) et à des analyses de textes faites en groupe (sur des extraits choisis communiqués au fur et à mesure). Viendront ensuite les exposés des séminaristes ; chacun d’eux travaillera sur une œuvre figurant sur une «Liste de textes» dont on trouvera une première version ci-dessous (une liste définitive sera communiquée un peu avant le début du séminaire).