Cahiers J. M. G. Le Clézio, numéro 10 : « Habiter la Terre »
Numéro coordonné par Rachel Bouvet et Claire Colin
Si la nature et les éléments naturels dans l’oeuvre de J. M. G. Le Clézio ont déjà fait l’objet de nombreuses études, justifiées par la richesse de ces thématiques dans l’oeuvre de l’auteur, en revanche celle de l’environnement, et des responsabilités de l’homme vis-à-vis de lui, a fait pour l’heure l’objet de moins d’attention. Pourtant, J. M. G. Le Clézio a éprouvé très tôt l’importance d’une conscience environnementale et a laissé entendre dans ses livres l’écho de questionnements liés à cet intérêt, faisant de lui dans la littérature française du XXe siècle l’un des premiers auteurs particulièrement concernés par la réflexion écologique.
Ce numéro 10 des Cahiers J. M. G. Le Clézio vise à susciter différentes réflexions sur la
manière d'habiter la Terre en fonction de trois axes principaux :
1) Représentation de l'environnement et de la relation entre l’Homme et la Terre dans
l'oeuvre de Le Clézio
En quoi le récit leclézien suscite-t-il une réflexion sur la façon dont l’Homme habite la Terre, sur son rapport à l’environnement? Les perspectives critiques récentes que sont la géopoétique, l’écocritique et l’écopoétique semblent d'emblée convoquées par certaines thématiques chères à l'auteur, comme celles de l’harmonie, du lien vital entre la nature et l’homme, du ressourcement de l’être au contact des éléments naturels. On pourra aussi se demander si les procédés du récit leclézien (importance accordée à la topographie, au recensement de la faune et de la flore dans leur infinie variété, l’enfant et la femme comme personnages privilégiés pour le rapport à la Terre) relèvent des approches critiques mentionnées précédemment. Ce sera l’occasion de montrer en quoi ces perspectives, encore mouvantes dans le champ critique actuel, se distinguent et se recoupent : si la géopoétique est centrée sur les questions de l’espace et du rapport à la terre, l’écocritique privilégie la question de l’environnement dans une perspective militante tandis que l’écopoétique lie étroitement le texte littéraire à l’environnement.
Le rapport entre environnement et écriture pourra également faire l'objet d'études: Le Clézio
lui-même n'a-t-il pas associé étroitement l'espace de la forêt et la création littéraire dans son
discours de réception du Prix Nobel en 2008 ?
2) Le Clézio et la pensée écologique
Si Le Clézio est parfois cité comme l’un des précurseurs de la pensée écologique, telle qu’elle apparaît à partir de la deuxième moitié du XXe siècle chez certains philosophes et essayistes avec lesquels l’auteur de La Fête chantée ou Ourania a pu même avoir un dialogue fécond (Pierre Rhabi tout particulièrement, mais on peut rappeler le rôle joué par Michel Serres, Luc Ferry ou Bruno Latour dans le développement de cette pensée écologique en France), aucune étude n’a encore approfondi la chronologie précise de cet intérêt. Alain Suberchicot souligne dans Littérature et environnement. Pour une écocritique comparée (Paris, Honoré Champion, 2012), combien L'Extase matérielle donne de l'importance à la question écologique : on pourrait alors se demander si d'autres oeuvres de la première période traduisent également cet intérêt. Que dire ensuite de l'évolution de cette pensée écologique dans les oeuvres à partir de 1980? Les publications récentes accordent-elles toujours de l'importance à cette question ?
Y a-t-il également une pensée écologique dans ses discours (discours de réception du prix Nobel), articles (« La Fête chantée »), conférences, entretiens... ? Peut-on déceler dans ces
textes une différence de tonalité ou de procédés vis-à-vis des récits ?
Cet intérêt pour la pensée écologique prend également la forme d’une transmission aux nouvelles générations. La littérature pour l'enfance de Le Clézio montre en effet un intérêt pour l’environnement et le rapport de l’Homme à la Terre : Voyage au pays des arbres, Pawana, les recueils Celui qui n'avait jamais vu la mer et Villa Aurore, publiés dans une édition pour la jeunesse en témoignent. Quelle est la teneur du message transmis ? Comment est-il mis en récit voire en image, s’il s’agit de textes illustrés? De quelle manière cherche-t-il à toucher le jeune public ?
3) Le mouvement écocritique et les questions de réception
Tout d'abord, on peut s'interroger sur la réception du mouvement écocritique par Le Clézio lui-même en s’intéressant aux influences, aux lectures qui ont pu marquer l’auteur. Il serait ainsi possible de s'intéresser aux préfaces de Le Clézio pour des oeuvres marquantes de la
pensée écologique, comme celle pour Une année à la campagne de Sue Hebbel ou celle pour L'almanach du comté des sables d'Aldo Leopold. L'étude pourrait ainsi mettre en évidence le rôle joué par Le Clézio dans l'introduction de la pensée écologique dans le milieu francophone.
Mais il serait également nécessaire de s’intéresser à la réception de Le Clézio dans le mouvement écocritique: est-il lu par les auteurs de ce mouvement, est-il pris en compte par la critique, par exemple aux États-Unis?
Ce questionnement permettrait aussi de réfléchir, à travers l’exemple de Le Clézio, à la façon dont ce mouvement littéraire est perçu en France. On pourra rappeler le célèbre jugement sur l’oeuvre de Le Clézio la qualifiant de « littérature de boy-scout », réentendu à l'occasion de l'attribution du prix Nobel, s’interroger sur la place dévolue à l’auteur dans l'écocritique francophone, et se demander si ces positions évoluent, si un premier bilan critique de ce mouvement peut être proposé à travers cet auteur.
Les articles proposés pourront entrer dans l’un de ces axes ou en recouper plusieurs, et
concerner toute l’oeuvre de Le Clézio et toute sa chronologie.
Les propositions, à envoyer à l’adresse klrcolin@gmail.com pour le 31 octobre 2015, doivent contenir un résumé (200-250 mots), une bibliographie, un titre et une notice biobibliographique (environ 5 lignes).
Calendrier
Réception des propositions de contribution (200-250 mots) accompagnées d’une
bibliographie, d’un titre et d’une notice bio-bibliographique : 31 octobre 2015
Transmission de l’avis motivé du comité éditorial et des deux coordinatrices aux auteurs : 15 décembre 2015
Réception de l’article rédigé (en suivant les normes de présentation de la revue) : 15 juin 2016
Transmission des corrections ou des recommandations aux auteurs : 1er octobre 2016
Retour définitif des textes revus et corrigés : 15 décembre 2016
Publication par l’éditeur : printemps ou automne 2017