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Appel à communication – Colloque international "Pour une géocritique du texte et du cinéma francophones"

Appel à communication – Colloque international
Pour une géocritique du texte et du cinéma  francophones
Université McGill, 28, 29, 30 avril 2016

        
Quand Bertrand Westphal se lançait dans une théorie de la « géocritique », il faisait d’abord le pari d’une relecture de la représentation des grandes villes et campagnes européennes depuis longtemps « racontées » dans les littératures occidentales. Il montrait aussi que derrière le travail des monarques, géographes, historiens et autres architectes, une bonne partie de la construction du « mythe » de ces villes et campagnes était l’œuvre des écrivains. On comprend sous cet angle la portée théorique des notions d’« imaginaire cartographique » (2007 : 115), de « représentation orchestrée » (275) ou de « perspective fictionnelle » (125) qui articulent les différents essais de l’auteur (2000, 2003) et notamment La géocritique : réel, fiction, espace (2007). Ces notions semblent converger vers une même observation : tout lieu désigné dans le texte est un lieu de « l’ordre littéraire » (61) ; mais dans un contexte de « littérature-monde », cet ordre littéraire ne saurait être confiné à un corpus occidental.    

En construisant des relations inattendues des personnages, des récits et des films à l’espace, le roman et le cinéma francophones découvrent en effet un immense potentiel géocritique qui redéfinit les genres eux-mêmes tout en inscrivant des langages littéraires et des techniques cinématographiques singuliers. Les dialogues dans Le ventre de l’Atlantique de Fatou Diome (2003) sont autant de tentatives de rectification de la topographie réelle de l’île de Niodior. Telle que reconfigurée dans Aux États-Unis d’Afrique d’Abdourahman Waberi (2005), la ville d’Asmara n’est plus le lieu-refuge communément admis mais l’uchronie d’une mondialisation plus humaine. Dans Solibo magnifique de Patrick Chamoiseau (1988), les rues, les marchés, les quartiers populaires de Fort-de-France forment les lieux revisités d’une mémoire collective enfouie. Et dans Les pieds sales d’Edem Awumey (2005), le Sahel ne dit plus une sécheresse endémique mais bien la médiation poétique d’une relation au monde. De même, Meursault, contre-enquête de Kamel Daoud (2013) n’est pas qu’une sympathique redécouverte nostalgique d’Alger-la-blanche, mais davantage une variation intertextuelle sur le raisonnement criminel.   

Le cinéma, de son côté, investit le cadre spatial par des moyens, des procédés et une temporalité propres qui permettent de construire une « identité spatiale » pour mieux asseoir une « altérité spatiale » en contiguité « lorsque les informations contenues dans deux segments spatiaux amènent le spectateur à inférer une continuité directe […] entre ces deux segments » (André Gaudreault et François Jost, 1990 : 95-96). Le cinéma construit aussi ses lieux par disjonction  proximale (séparation de deux espaces proches) et par disjonction distale, c’est-à-dire « tout ce qui, dans un deuxième plan, est rejeté dans un ailleurs irréductible à l’espace représenté dans le plan précédent » (Ibid.). Ces outils d’analyse autorisent bien une géocritique du genre filmique francophone (Christine Lahaie : 2011) en posant une série de questions. Comment redécouvrir Casablanca dans Casanegra de Nour Eddine Lakhmari (2008) comparée à la vieille Casablanca de Michael Curtiz (1942) ? Quelle est cette intrigante Alger du film Morituri d’Okacha Touita (2007) adapté d’un roman de Yasmina Khadra ? Que dire de la ville de Kinshasa telle qu’elle réapparait dans Viva Riva de Djo Tunda Wa Munga (2010) ? Comment interpréter les mises en scène de l’espace rural dans les films de Souleymane Cissé, Jean-Claude Flamand Barny, Jean-Baptiste Lucien ou Ousmane Sembène ?  

C’est pour interroger les possibles géocritiques du roman et du cinéma francophones que le Département de langue et littérature françaises (DLLF) de l’Université McGill organise un colloque en avril 2016. Il s’agit de se demander comment l’espace référentiel habituel se dissout dans un imaginaire de l’espace qui en déconstruit les codes classiques et les fonctions consacrées. Autrement dit, en quoi l’urbanité littéraire et filmique africaine, maghrébine ou antillaise transforme le décor anomique habituel en une véritable architexture de paroles et d’images ? Contrairement à sa réputation de terrain de confrontation tribale, la géographie rurale n’est-elle pas d’abord l’espace ouvert de reconfiguration des pays et du monde ? Le lieu d’exil en Europe ou en Amérique, souvent vu ou vécu comme un mur des lamentations, n’est-il pas plutôt l’endroit de négociation d’un nouvel humanisme transnational ?          

Sans être exhaustifs, les propositions pourront s’inscrire dans les axes suivants :

- Géocritique du texte et du cinéma francophone : état des lieux
- Espace romanesque, espace filmique et théories postcoloniales
- Sujet migrant et réappropriation du territoire dans le roman et le cinéma francophones
- Lieux (ré)habités de l’ici et de l’ailleurs

Les propositions de communication doivent être envoyées par courriel en français avant le 30  juillet 2015 à mbaye.diouf@mcgill.ca  et  francoise.naudillon@concordia.ca

La longueur des propositions est de 25 lignes maximum (Time New Roman 12, sans interligne) suivies d’une notice biobibliographique de 10 lignes maximum comportant votre nom, institution d’attache, domaines de recherche et publications récentes. Le Comité scientifique du colloque évaluera toutes les propositions reçues et les auteur.e.s seront avisé.e.s le 1er septembre 2015.  

Responsables du colloque : Mbaye Diouf (Université McGill) et Françoise Naudillon (Université Concordia)  


Blog du colloque : géocritiquefrancophone.wordpress.com   (en construction) 

Participation / Organisation

Organisateur membre
Organisateur non-membre
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