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Appel à contributions - revue littéraire Chameaux « Écriture de l'intime au masculin »

Aujourd’hui, qu’est-ce que l’intime ? Selon Manon Brunet, il s’agit d’une « activité “sociale”, c’est-à-dire qui implique l’insertion d’un individu dans une activité prenant forme et signification à travers la relation, plus ou moins intime, que cet individu entretient avec son environnement » (Brunet et Gagnon, 1993). Autant dire que tout est intime, sans qu’on sache pour autant en définir la nature. Or, où commence l’intime, et où s’arrête-t-il ? La juridiction européenne établit une distinction entre « la vie intime », « la vie privée » et « la vie publique » ; la première concerne le rapport d’un sujet avec lui-même, ses aspirations personnelles, ses désirs, etc. La vie privée a trait aux liens entre le sujet et ses proches, famille et amis. Quant à la vie publique, elle place le sujet au centre d’un système politique, sociétal et culturel dont il est l’acteur et le spectateur. Mais est-ce suffisant ? Depuis quelques décennies, n’assiste-t-on pas à un brouillage des valeurs de plus en plus marqué ? Ce phénomène n’est pas sans rapport avec l’accentuation du métissage entre l’intime et le médiatique, dont Facebook et les téléréalités sont d’importants avatars. Rappelons aussi que la conception de l’intime diffère selon les époques et les espaces.

L’intime, compris comme le récit de soi, couvrirait de nombreux genres, pratiques et formes : l’(auto)biographie, l’autofiction, les confessions et romans de la mémoire engagent un rapport entre le sujet écrivant et lui-même. On peut aussi parler de ce qu’il est coutume d’appeler les écritures domestiques : journaux intimes, carnets de notes, correspondances. C’est dire l’étendue de la représentation de soi, dans les livres, les films, les œuvres d’art. Face au foisonnement de ces écritures, le critique est dans une impasse : comment étudier la fiction dans ce qui n’en serait pas a priori ? Quelle lecture peut-on développer au sein de ce qui s’apparente à une constante oscillation entre réel et fiction?

À ces questionnements s’ajoute un préjugé, parfois tenace : celui de la différence sexuelle. En 1998, un collectif dirigé par Christine Planté s’interrogeait : « l’épistolaire, un genre féminin ? ». Dans un autre ouvrage publié en 1989, Planté établissait le constat suivant : « On la suppose [la femme] incapable de s’arracher à son expérience vécue pour entrer dans le point de vue, la psychologie, le langage d’un autre, et derrière ses personnages, c’est toujours une forme d’autobiographie déguisée qu’on déchiffre » (Planté, 1989). Aussi, les écritures au féminin ont traditionnellement été qualifiées d’écritures de l’intime, contrairement aux écritures au masculin qui véhiculeraient le modèle canonique du roman réaliste. En outre, les écritures domestiques relèveraient de la sphère privée, de la maison, là où règne « la femme » tandis que « l’homme » évolue sur la place publique. Or, les études féministes, puis les gender studies ont su épuiser la théorie d’une spécificité naturelle de l’écriture, tant masculine que féminine. Néanmoins, l’approche différentialiste perdure ; ainsi, du féminin au masculin, quelles relations pouvons-nous tisser entre une expérience du genre sexuel et l’écriture de l’intime ?

L’équipe de Chameaux vous convie à participer à son septième numéro : « Écritures de l’intime au masculin ». Ce numéro s’inscrit au carrefour de plusieurs perspectives d’étude actuelles qui élargissent le corpus classique tout en repensant les théories littéraires et artistiques : la découverte des textes longtemps mis à l’écart de ce qu’on appelait les « belles-lettres » ; la mise en crise de la fiction ; et le décloisonnement des genres sexuels et des topoï qui y étaient associés. Au sein d’un texte de l’intime, la marque du genre est-elle effective ? Les écritures de l’intime au masculin peuvent-elles modifier le rapport du sujet écrivant à son écriture ? Comment l’expérience oppressive ou libératrice du genre sexuel joue-t-elle dans son rapport à soi ?

Nous sommes également ouverts à publier des textes de création qui s’inscriraient dans le thème du numéro et qui emprunteraient à des genres de l’intime (journaux intimes, correspondances, etc.).
La date de tombée de ce septième numéro est le lundi 20 janvier 2014. Envoyez vos contributions, d’une longueur maximale de 5000 mots, à chameaux@lit.ulaval.ca et n’hésitez pas à nous écrire à cette adresse si vous souhaitez obtenir plus d’information. Nous vous invitons à conformer votre texte au protocole éditorial de la revue (http://revuechameaux.wordpress.com/protocole-editorial) avant de le soumettre. Veuillez prendre note que les propositions d’articles ne seront pas évaluées, mais seuls les textes entiers.

Au plaisir de vous lire !

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