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Sémiotique et critique - revue Cygne noir n°10 (appel)

Appel de texte

Les premières théories modernes du signe, celles de Charles S. Peirce et de Ferdinand de Saussure, s’inscrivaient dans la mouvance positiviste et souhaitaient contribuer à l’étude des sciences et de la connaissance objective des signes en tant que composants du monde phénoménologique ou linguistique. Saussure a posé l’existence d’un système universel, la langue, dégagé de toute dimension pratique. Ce modèle s’avérera décisif au mitan du vingtième siècle, moment fort du structuralisme (lequel fera assez rapidement l’objet de vives critiques). Mais chez Peirce, déjà, se faisait jour l’idée de critique au sens logique, fondamentale à l’examen des signes dans leur fonctionnement effectif et pratique. La critique, que Peirce appelle aussi tout simplement logique, a pour rôle d’évaluer la validité des signes (au regard de leur forme et en accord avec les lois gouvernant leur assemblage) selon la médiation que ceux-ci performent et le savoir qu’ils produisent ou la conduite qu’ils informent. Cette vision de la critique implique une première réflexivité sémiotique. Il faudra toutefois attendre l’entre-deux-guerres et la théorie critique de l’École de Francfort pour que l’activité intellectuelle et scientifique soit examinée de manière véritablement critique, c’est-à-dire au regard de l’idéologie entendue au sens marxiste de fausse conscience. Dans le sillage de Karl Marx, de Max Weber et de Georg Lukács, l’École de Francfort défend l’élaboration d’un outillage et d’une méthode dialectique capable de nourrir une théorie critique de l’industrie culturelle avec, pour concept-clé, la rationalité. Elle replace le processus de domination technoscientifique de la nature à l’intérieur d’un cadre qui permette de le réfléchir sociologiquement. Ce faisant, elle cherche à dépasser la théorie dite « traditionnelle », caractérisée notamment par un imaginaire de neutralité scientifique. Conformément au programme énoncé par Max Horkheimer, pour dépasser la théorie traditionnelle, la théorique critique doit tenir compte des conditions de sa genèse et de sa détermination par des intérêts sociaux dont l’influence est prépondérante dans la production de connaissances. Parce qu’elle méconnait les multiples facteurs qui concourent au développement de son appareillage conceptuel, la théorie traditionnelle manque de réflexivité. Elle se révèle ainsi idéologique malgré elle et contribue à normaliser et à reproduire la société existante. De ce point de vue, la construction du sens arrimée à la théorisation traditionnelle participe inévitablement du pouvoir ; mais cela implique-t-il que sa déconstruction s’inscrive automatiquement de façon oppositionnelle et qu’elle réponde à une exigence de transformation de la réalité? L’idée de ce numéro n’est pas tellement de définir ou de circonscrire les limites ou les possibilités d’une sémiotique critique que d’interroger les rapports de sens installés ou possibles entre, d’une part, la notion de critique, ses implications, et la théorie critique ou les « savoirs critiques » et, d’autre part, les études sémiotiques, la réalité de leur pratique et la finalité de leur production signifiante.

Prière de consulter l'appel complet ci-joint au format PDF.

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