Considérée comme l'une des romancières les plus importantes de la littérature québécoise et canadienne moderne, Gabrielle Roy (1909-1983) a laissé une oeuvre aussi abondante que diversifiée, qui ne cesse d'intéresser encore aujourd'hui un public grandissant de lecteurs, d'étudiants, de critiques et de chercheurs. Si la quinzaine de livres qui forment l'oeuvre canonique de G. Roy, depuis Bonheur d'occasion (1945) jusqu'à La Détresse et l'Enchantement (1984), sont bien connus du public et largement étudiés et commentés depuis longtemps, il n'en allait pas de même de ce qu'on appelle la partie «immergée» de l'oeuvre royenne, qu'on ne peut plus ignorer aujourd'hui si l'on veut mieux comprendre l'univers et l'art de la romancière. Ce corpus est composé d'inédits (une cinquantaine de textes littéraires et près de 2000 lettres), de «quasi-inédits» (des textes publiés dans des périodiques, surtout pendant les années 1940, et peu accessibles aujourd'hui) et de manuscrits, dactylogrammes et autres avants-textes qui permettent d'étudier le travail d'invention et l'écriture de l'écrivain.
Le programme de recherche s'inscrit dans le prolongement du travail mené par le Groupe de recherche sur Gabrielle Roy depuis 1996, qui a consisté en l'édition critique, en l'édition électronique et en l'analyse de ce corpus «immergé» et pratiquement inconnu du public et des chercheurs. Il vise surtout à pousser plus avant les travaux amorcés dans cadre du projet «Gabrielle Roy: du manuscrit au virtuel» (CRSH 2009-1012), qui ont permis la constitution d'une communauté virtuelle, l'HyperRoy (www.hyperroy.nt2.uqam.ca), un site interactif qui rassemble les chercheurs et les lecteurs intéressés à l'oeuvre de la romancière, où seront désormais publiés plusieurs de ses manuscrits et de ses inédits.
Depuis 1997, huit recueils d'inédits de G. Roy ont paru (Le Temps qui m'a manqué, 1997; Ma chère petite soeur, 1999; Le Pays de Bonheur d'occasion, 2000; Mon cher grand fou, 2001; In Translation, The Gabrielle Roy-Joyce Marshall Correspondence, 2005; Femmes de lettres, 2005; Rencontres et entretiens, 2005; Heureux les nomades, 2007). À cette liste s'ajoutent l'édition électronique du Temps qui m'a manqué (2007) et de La Détresse et l'Enchantement (2011) et la publication de quatre recueils d'études critiques (Gabrielle Roy inédite, 2000; Gabrielle Roy réécrite, 2003; Gabrielle Roy contemporaine, 2007; Gabrielle Roy et l'art du roman, 2010). L'équipe, composée de Sophie Marcotte (Concordia), Jane Everett (McGill), Jacinthe Martel (UQAM) et François Ricard (McGill), compte poursuivre le travail d'édition critique, sous forme électronique, des récits brefs, nouvelles, romans et lettres inédits de G. Roy, de billets et de chroniques publiés au tout début de sa carrière, ainsi que des dossiers génétiques des oeuvres publiées. Ces travaux d'édition et d'analyse, qui passent par un renouvellement du corpus et par l'exploitation des ressources électroniques comme mode principal de dissémination, permettront également l'étude des méthodes d'écriture et de l'art du roman et de la lettre chez G. Roy. Ils continueront d'assurer une diffusion à grande échelle et une meilleure connaissance de l'oeuvre, de la pensée et de l'écriture de G. Roy, et donc de la littérature canadienne et québécoise. En plus de contribuer à l'avancement des connaissances dans plusieurs domaines des études littéraires tels la textologie, la génétique littéraire, l'épistolographie et la sociologie de la littérature, ils pourront, parce que le site HyperRoy est conçu selon la philosophie open source, servir de modèles à d'autres entreprises de même nature au Québec et au Canada, où la publication électronique de manuscrits littéraires demeure encore peu pratiquée.