Isabelle Eberhardt, jeune écrivaine-voyageuse de la fin du 19ième siècle est un bien curieux météore dans l’histoire de l’Algérie et de sa littérature en français, dont elle est, en sa qualité de transfuge, reconnue à titre de pionnière. En effet, son introduction dans le corpus algérien révèle une chose : son rapport au territoire, au paysage et à la population algérienne a dépassé le simple regard unidirectionnel des voyageurs de son temps. Pour cause, la relation qu’elle entretient avec « son pays d’élection » s’inscrit notamment dans une réelle communion entre l’horizon qu’elle contemple, prostrée sur la rive méditerranéenne, ou en plein désert, et le vertige qu’elle éprouve depuis l’abandon définitif de toutes ses attaches. Adoptant une pratique spatiale et intellectuelle errante, elle conçoit ces paysages comme support d’une rêverie qui l’emporte entre sensation de néantisation dans l’immensité et quête d’absolu, au-delà de toutes frontières.
Chloé Charbonneau vient de terminer une maîtrise en études littéraires (UQAM) sur la filiation métisse dans la littérature algérienne, à partir des œuvres d’Isabelle Eberhardt, Assia Djebar et Nina Bouraoui.
Références
Anzaldùa, Gloria, « La conscience de la Mestiza, vers une nouvelle conscience », Les cahiers du CEDREF, vol. 1, n ͦ 18, 2011, p. 75-96, en ligne, doi < 10.4000/cedref.679>.
Bouraoui, Hédi, Transpoétique. Éloge du nomadisme, Montréal, Mémoire d’encrier, 2005.
Bouvet, Rachel, Pages de sable. Essai sur l’imaginaire du désert, Montréal, XYZ, coll. « Documents », 2006.
Eberhardt, Isabelle, Écrits sur le sable. (récits, notes et journaliers), Œuvres complètes I, Paris, Grasset & Frasquelles, 1988.
Hentsch, Thierry, La mer, la limite, Montréal, Héliotrope, 2015.
Lotman, Youri, « L’espace sémiotique », dans La Sémiosphère, Limoges, Presses Universitaires de Limoges, 1999, p. 9-32.