C’est au milieu du XVIIsiècle, en France, que le portrait s’affirme comme genre littéraire. Pour la société raffinée qui s’épanouit dans les salons des précieuses, le portrait devient un vrai jeu mondain. «Les portraits reposaient sur des métaphores extrêmement codées et des descriptions très détaillées. Toujours, on tentait d’établir un lien entre le physique et le psychique, entre des traits corporels et des traits moraux. Cet art du portrait qui visait, à partir d’une représentation corporelle, à révéler les ressorts les plus secrets de l’être, connaîtra un succès considérable, jusqu’à devenir un parcours obligé, dès lors qu’il s’agissait de décrire des personnages.
Ainsi, de Clélie (1654-1660) de Madeleine de Scudery, jusqu’à Julie ou la nouvelle Héloïse (1761) de Jean-Jacques Rousseau, les textes mettant en scène des portraits se multiplient, dans un contexte marqué par la diffusion des miroirs et des miniatures. Les portraits, descriptifs ou peints, vont figurer comme motif récurrent dans les romans, les pièces de théâtre ou les mémoires écrits au cours de cette période.
L’analyse des recueils de portraits, de même que l’examen des recommandations faites aux peintres, montrent qu’on attend du portrait qu’il ne se limite pas à la retranscription des traits du corps, mais qu’il soit un révélateur de l’âme : vices et vertus, passions et désirs, caractère et tempérament. En même temps, cette capacité à atteindre l’invisible par le visible fait l’objet d’une importante critique. Finalement, ce qui se posera comme révélation, c’est que l’on est toujours en représentation. Dans le cadre de ce projet, on tentera donc de comprendre comment le portrait devient un lieu où s’incarnent aussi bien «es plus vives espérances sur les possibles d’une représentation du corps apte à livrer l’intériorité, que les plus grandes inquiétudes sur un monde dominé par les apparences.