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H-2018 - Approche du travail créateur: matières à inquiétude

Individu·s lié·s: 
Horaire du séminaire: 

Hiver 2018

Département d'études littéraires - UQAM

Pratiques d’écriture narrative. Théories de la narrativité, théories de la lecture, théories de la fiction. Les participants et participantes produiront des textes de fiction et des essais théoriques qui leur permettront de développer une approche de la création littéraire axée sur la notion d’inquiétude. Les effets de lecture et les stratégies d’écriture. Le rapport au doute. Production, lecture, réflexion, analyse, réécriture.
 
En interrogeant les modalités d’apparition de l’inquiétude dans le processus de création ainsi que le conflit productif qui accapare le lecteur devant des objets littéraires inquiétants, le séminaire Approches du travail créateur – Matières à inquiétude veut générer et éclairer des pratiques narratives qui n’ont ni comme projet de rassurer, ni comme souci principal, paradoxalement, de raconter. Ces pratiques recherchent plutôt à orchestrer un inconfort qu’elles s’assurent de transmettre par les œuvres qui en sont issues, elles-mêmes déroutantes, non fiables, dysfonctionnelles sur le plan du récit. 
Ces pratiques occupent et créent un espace instable de la parole qui, tel que l’exprime Foucault, « manque de repos », comme si elles contenaient cet « état d’agitation d’un esprit insatisfait » et se présentaient comme l’ombre des « pouvoirs et dangers qu’on imagine mal » (Foucault, 1971 : 10), avec lesquels, pourtant, créateurs et lecteurs n’ont d’autre choix que de négocier. La porosité des frontières de la fiction, les approches mystificatrices qu’elle encourage, malmenant les possibilités de véridiction, constituent tout autant de modes de représentation ambigus que la création investit pour leur insaisissabilité : « quelque chose fait irruption qui déborde le système du pensable et ouvre une possibilité de “penser autrement” » (Certeau, 1987 : 53). Un tel débordement, une telle irruption – que la notion d’inquiétude vient désigner ici – pousse naturellement au surgissement de la fiction (mécanisme compensatoire à l’incertitude), mais peut aussi devenir réel lieu à investir par la fabrication, l’imposture, voire la mauvaise foi : « la littérature […] peut relever de conduites qualifiées dans le langage courant de mauvaise foi : c’est-à-dire mentir, duper le lecteur, le surprendre, exercer sur lui son emprise, sa force de séduction. Mais aussi d’une mauvaise foi sartrienne entendue comme capacité à forger des concepts contradictoires, et donc comme mode très spécifique de pensée qui modifie son rapport au réel, à la vérité et au lecteur. » (Decout, 2015 : 19). 
À partir de ces observations critiques, il s’agira d’examiner la conduite du créateur, soit de mieux saisir comment il se comporte à titre d’inquiéteur : 1) en faisant advenir la fiction dans son quotidien (rêve, mémoire, altérité, aliénation, fantasme) pour troubler son propre rapport au réel (reconfigurer ses zones de confort) et susciter son écriture; 2) en développant des stratégies narratives appuyées sur la feintise ludique dissimulée (Randall, 2017) dans le but d’ébranler la lecture et d’éveiller le soupçon, jusqu’à entraîner une interprétation réparatrice de l’œuvre dysfonctionnelle (surinterprétation, Eco, 2002; relecture policière, Bayard, 1998).
Sur le plan pratique, le chercheur-créateur se montrera sensible aux attentes du lecteur dans le processus d’écriture. Il sera invité à renouveler ou à réactualiser la forme, à pousser sa création – et à penser la création – vers une indétermination significative, à mettre en relation, de manière réflexive et autrement productive, l’équivocité inscrite dans les œuvres, celle qui hante le geste interprétatif du lecteur et le doute plus introspectif ; le doute comme motif de l’écriture et condition de l’écrivain.
  
Objectifs
Le séminaire Approches du travail créateur – Matières à inquiétude vise à :
- acquérir une compréhension des enjeux de création liés aux notions d’inquiétude, de doute et d’inconfort en littérature narrative ;
- acquérir des compétences théoriques, critiques et méthodologiques pour structurer une pensée pertinente et personnelle sur la création et la fiction ;
- développer une réflexion sur les ambiguïtés et l’indécidabilité du texte narratif ;
- mettre en relation différents textes littéraires et théoriques dans le but d’éclairer des pratiques et comportements de lecture inconfortables ;
- participer aux discussions et débats visant à interroger des concepts ;
- réaliser des travaux de nature diverse qui s’inscrivent dans le cadre d’une recherche-création et mettent en jeu la problématique de l’inquiétude ;
formuler des retours critiques sur sa pratique, ainsi que sur les réflexions et créations de différents chercheurs-créateurs.
Statut du séminaire: 
Terminé